Daum Nancy bonbonnière « Pensées » circa 1898
Bonbonnière couverte en verre opalescent multicouche à décor dégagé à l’acide et émaillé de fleurs de pensées sur un fond givré à rehauts d’émaux polychromes et or, le couvercle ourlé d’une frise de fleur en rappel sur or amati.
Signée “Daum # Nancy” sous la base
Époque Art Nouveau
Circa 1898
Parfait état
Daum (ex Compagnie française du cristal Daum) est une cristallerie fondée en 1878 à Nancy, en Lorraine, en France, par Jean Daum.Les bancs et la halle de Daum ont formé quelques-uns des grands noms de l’Art Nouveau: Jacques Grüber, Henri Bergé, Almaric Walter, ainsi que les frères Schneider qui y firent leurs débuts.
À la suite de la guerre de 1870, Jean Daum (1825-1885), notaire à Bitche, vend son étude et opte pour la France. L’annexion de l’Alsace-Lorraine par l’Empire Allemand provoque un grand renouvellement pour la ville de Nancy. En effet, dès 1870, un flux de capitaux, d’idées, de compétences et de savoir-faire va permettre à Nancy de devenir un des piliers des arts décoratif français. La cristallerie Daum est un des plus remarquables exemples de cette migration.
En 1876, Jean Daum s’installe à Nancy et prête, la même année, de l’argent à plusieurs reprises à Avril et Bertrand, propriétaire de la verrerie Sainte-Catherine de Nancy, une manufacture qui produit du flaconnage et de la gobeleterie ordinaire. L’entreprise ne trouve pas son équilibre financier et Daum est contraint de la racheter : il y investit 50 000 francs le 23 mars 1878 et devient chef d’une entreprise de 150 ouvriers, dans un domaine dont il ignore tout.
En 1878, il y associe son fils Auguste, mais il ne connaît pas les premiers succès de l’entreprise. À sa mort, en 1885, Auguste prend seul la direction de la verrerie avant d’être rejoint, en 1887, par son frère Antonin, tout juste diplômé de l’École centrale des arts et manufactures de Paris.
Devant la mauvaise santé financière de la verrerie, Auguste, qui suivait une formation de juriste, se voit obligé d’en prendre la tête, après qu’elle a été rachetée pour la sauver de la faillite. Antonin commence par embellir les services de table courants et est chargé de la création, tandis qu’Auguste assure l’administration. Familiarisé avec les techniques du verre de par sa formation, Antonin oriente la production vers la création artistique. Les deux frères mettent sur pied, entre 1889 et 1891, un département artistique confié à Antonin auquel Auguste donne tous les moyens et l’invite à suivre le sillon creusé par Émile Gallé, initiateur de la verrerie d’Art Nouveau.
Antonin commence, avec quelques modèles simples, pour continuer rapidement avec la gravure à l’acide, puis, en passant à des modèles utilisant les techniques de gravure à la roue, de verres à deux ou trois couches. De 1890 à 1914, il ne crée pas moins de trois mille références.
Jacques Grüber est le premier artiste de la verrerie. Recruté en 1893, on lui confie la création de pièces en vue de figurer à l’Exposition Universelle de Chicago de 1893. Ce fut le premier grand succès qui propulsa Daum dans le cercle fermé des industries d’art. Les Daum y gagnent la participation à l’Exposition d’art décoratif lorrain aux galeries Poirel de Nancy en 1894. Il y eut ensuite les expositions de Lyon (1894), Bordeaux (1895) et Bruxelles (1895 et 1897, pour laquelle il réalise le Vase Tristan et Yseult), au cours desquelles ils reçoivent des distinctions.
Une école de dessin est créée, en 1897, à l’intérieur de l’entreprise qui forme ainsi ses propres décorateurs et graveurs. En sortiront notamment Émile Wirtz, qui restera à la manufacture, et Charles Schneider, qui montera ensuite sa propre verrerie.
Henri Bergé y est maître décorateur, c’est le deuxième artiste de l’entreprise. Il aura à ses côtés Émile Wirtz à partir de 1898.
La consécration de l’aventure arrive lorsque le premier grand prix pour la verrerie d’art de l’exposition universelle de 1900 est décerné à Daum et à Gallé. Daum y présente des pièces préparées avec soin : le décor intercalaire (brevet de 1899) et les luminaires qui deviennent une spécialité.
En 1901, les statuts de l’École de Nancy sont officiellement posés. Émile Gallé est l’homme à l’origine de ce regroupement et en devient président. Antonin est vice-président. Antonin est également une des personnalités de la chambre de commerce de Nancy. Il joue un rôle important en 1909 lors de l’Exposition Internationale de l’Est de la France qui marque la fin de l’École de Nancy. Auguste meurt en 1909, Antonin est actif jusqu’à sa mort en 1930, mais partage les responsabilités avec les fils d’Auguste : Jean, Henri et Paul.
Jean meurt en 1916, Henri est gérant comme son père. Paul est diplômé de l’Institut de physique et chimie de Nancy, il prendra progressivement la place d’Antonin. Les Daum assurent après 1918, l’adaptation de l’entreprise aux nouvelles conditions de production, soucieux d’y maintenir qualité, techniques et orientations esthétiques plus qu’utilitaires.
Dans les années 1920, Paul oriente la production vers l’Art Déco devant la perte d’intérêt du public pour l’Art nouveau : le style de Daum évolue, marqué dans les années 1915-1920 par des verres translucides ou opaques aux teintes vives et unies, dans des coloris inédits et avec des formes géométriques. La verrerie des années 1920 est marquée par la recherche de teintes franches et peu courantes : Daum s’illustre dans le bleu, jaune, rouge, vert, violet et le blanc, mais d’autres artistes comme Charles Schneider, Michael Powolny, ou les verreries de Murano explorent aussi dans cette direction. L’ajout de liserés, sur le pourtour supérieur ou au niveau de la transition entre le pied et la panse, sont des spécificités de Daum.
La transition de style se fait progressivement ; ainsi, l’inspiration botanique de l’art nouveau continue à faire effet, mais elle devient stylisée plutôt que naturaliste. En parallèle apparaissent les thèmes de l’art déco, tels que le néoclassicisme et les références aux antiquités grecque et égyptienne.
La simplification des formes s’accompagne de l’utilisation de nouvelles techniques, tel que le verre bullé.
En 1920, Daum collabore avec plusieurs artistes, tels qu’André Groult pour la réalisation de flacons de parfum, mais aussi Paul Follot et Francis Jourdain.
La demande est importante et l’entreprise prospère. Elle ouvre une deuxième cristallerie Belle-Étoile à Croismare, en 1925, dont Paul est le directeur. Elle fournit de la verrerie blanche, des boules, de la fantaisie signée Lorrain. C’est à cette période que les musées de Nancy achètent une dizaine d’œuvres Daum pour qu’elles rejoignent les collections.
Pierre Davesn crée des modèles à partir de 1928. La crise économique des années 1930 touche Belle-Étoile qui est fermée en 1934. Quelques grosses commandes permettent à l’entreprise de poursuivre sa production : en 1935, la Compagnie Transatlantique commande 90 000 pièces en verre et cristal pour le paquebot Normandie.
L’entreprise continue de participer aux grandes expositions : salon d’automne de 1921, Barcelone en 1923, Exposition internationale des Arts déco à Paris en 1925, Exposition coloniale à Paris en 1931.